« Qui d’entre nous n’a pas eu une fois l’envie de franchir la porte d’entrée de la Chartreuse de la Valsainte ?… et de visiter le couvent ? Le panneau est clair, affiché sur le mur : « On ne visite pas la Chartreuse ! » Le touriste de passage se contente d’un arrêt tranquille, sur la petite place, le temps de saluer le frère portier.
Le réalisateur Philippe Gröning a vécu de longs jours au sein de la Grande Chartreuse pour réaliser son film. Une pure merveille qui n’a rien d’un documentaire. Tout au long de la projection, ni musique de fond, ni commentaire explicatif. Vous êtes simplement, mais intérieurement, invité à vivre avec les frères et les pères de la Chartreuse. Incroyable !
« Laissez vous séduire et entraîner dans « Le grand silence », dans la vie du monastère. Tantôt vous parcourez le cloître, vous rendant avec vos nouveaux confrères à l’office de nuit, où seule une petite lumière rouge brille dans l’obscurité. Ils se passent, de l’un à l’autre, la corde de la grande cloche et trouvent leur place dans une stalle pour chanter, avec tous les moines : « Venite Exultemus Domino ».
« Vraiment, c’est avec eux que vous vivez, c’est avec eux que vous vous agenouillez, le temps de réciter un « Ave Maria », en baisant humblement la terre. Avec eux encore, vous vous retrouvez, accompagnant dans sa nouvelle cellule un jeune novice, qui a demandé au Prieur la grâce de la vie contemplative.
« Devenu chartreux, vous êtes progressivement initié à la pratique de la méditation, à trouver votre équilibre entre lecture, travail manuel et repos de midi. On s’assied au coin du jardin, dans son désert, pour prendre son repas.
« Comment Philippe Gröning a-t-il su si bien s’introduire pendant six mois au monastère dans la vie des moines, au point de se faire oublier ? Il filme sans que personne ne s’aperçoive de sa présence. Chaque moine, père ou frère, vit sa vie comme à l’accoutumé.
« Avec un frère convers, vous vous retrouvez dans l’atelier de couture. D’un geste tranquille et soutenu, il mesure son drap, en découpe un morceau et l’assemble à un autre. Il prépare le futur habit du nouveau moine !
« Le spectateur reste saisi de tant de grandeur, si simple, si humaine et si mystique à la fois. Et comment oublier ce moment où l’orage gronde dans toute la vallée de la Chartreuse ? Le monastère semble se rapetisser, se protéger. On entend le bruit de la pluie qui se déverse, qui s’écoule tendrement le long des toits… Et ça tonne. Et voilà que surgit de nulle part un moine qui, d’un pas lent, traverse la cour et disparaît dans un cloître. L’artiste était là, juste à ce moment !
« La Grande Chartreuse a donné son accord à cette réalisation. Nous ne pouvons qu’exprimer notre reconnaissance à cette communauté et à son Révérend Père. C’est merveilleux, il faut le dire. Grâce à leur esprit d’ouverture, les moines de la Chartreuse nous offrent ce cadeau incroyable : Vivre du dedans, du cœur du monastère, leur vie de prière, de médiation et de don de soi.
« A voir… à vivre… absolument ».
Père Jean-Pierre Barbey
Source : cath.ch